Les coopératives allemandes spécialisées en énergies renouvelables
Série de 3 articles
Au mois de mars, à l’invitation de la coopérative Cera, une vingtaine de personnes intéressées par le modèle coopératif ont pris le car vers l’Allemagne. Objectif: la visite de trois coopératives citoyennes spécialisées dans les énergies renouvelables. Les Allemands sont les leaders européens des énergies renouvelables. Il y a plus de 7.000 installations de biométhanisation, principalement agricoles; des sociétés anonymes (dans l’électricité, le pétrole); mais aussi toute autre société… ont investi dans l’énergie renouvelable. Des sociétés coopératives s’y sont intéressées, estimant qu’il n’est pas bon de laisser toute la gestion de l’énergie au (grand) capital.
Nous présentons dans cet article la seconde coopérative que nous avons visitée, qui fut créée pour chauffer le village de Wallen.
Une coopérative pour chauffer le village
Le village de Wallen (entité de Meschede), qui se situe à mi-chemin entre Dortmund et Kassel, compte environ 500 habitants. La majorité des maisons sont anciennes. Notre guide, l’ingénieur Donner, explique que les maisons doivent, à terme, être isolées. Mais cette isolation défigurerait les maisons à colombages. Dès lors, en 2009, les habitants ont proposé une autre formule: créer une coopérative pour chauffer les maisons grâce à un réseau de chaleur et des énergies renouvelables: panneaux photovoltaïques, biogaz, plaquettes forestières. Une ferme fournirait son excédent de biogaz. Les plaquettes proviendraient de bois de rebut (bois le long des routes, premières éclaircies…). Outre le chauffage du village, la coopérative fournirait des activités complémentaires à certains habitants, dont des agriculteurs. Le village compte une centaine de maisons et 9 artisans. La toute grande majorité (90%) accepte d’être chauffée par le réseau de chaleur. Il y a eu quelques refus, dont de nouvelles maisons, chauffées par géothermie. Une chaudière à mazout serait prévue pour suppléer toutes les sources d’énergie, en cas de panne généralisée. Les autorités acceptent la proposition et une coopérative citoyenne est constituée début 2011. Des bâtiments vont être construits sur une prairie, donnée à bail emphytéotique, en retrait du village, pour restreindre le charroi. Une conduite de biogaz, en provenance de la ferme, va passer sous une route et des prairies pour aboutir à la cogénération installée dans un des bâtiments. Un réservoir tampon de 30.000 l est prévu pour assurer un bon volant d’inertie pour l’eau chaude. Une grande installation photovoltaïque sera installée sur la partie abritant les plaquettes de bois. Un télescopique sera nécessaire pour les manipulations. La construction du réseau de chaleur de près de 6 km de long débute fin août 2011. Un Chaque coopérateur paie 2.500 euros de parts; en contrepartie, il reçoit un échange de chaleur. Un propriétaire disposant de plusieurs maisons paie en fonction de ses propriétés mais ne dispose que d’une voix à l’assemblée générale de la coopérative. Le capital de départ est de 300.000 euros, l’investissement total est de 1,8 million d’euros. Le photovoltaïque constitue un investissement séparé de 200.000 euros, l’électricité est écoulée sur le réseau à 0,26 euro/kWh. En subsides, la coopérative reçoit 630.000 euros. Le reste est un emprunt bancaire, à 1,8% d’intérêt, à rembourser jusqu’en 2023, à raison de 7,2 cents/kWh.
Après 2023, on devrait pouvoir diminuer le prix de la chaleur. Toutefois, il faudra commencer à songer au remplacement de la chaudière à plaquettes. Les constructions et le réseau de chaleur sont terminés en décembre 2011. Les maisons sont alimentées en eau chaude, les villageois n’ont pas voulu faire le pas supplémentaire, à savoir la fourniture d’électricité. Une partie de l’électricité générée sert les besoins de la coopérative. Si les besoins électriques sont satisfaits par le solaire, la cogénération est arrêtée et le biogaz est brûlé dans la chaudière à mazout. La coopérative consomme 1.500 à 2.000 m3 de plaquettes par an et dispose d’un stock possible de 2.400 m3. Le bois en plaquettes est rendu sur place à 15 euros/m3, ce qui revient à 25 cents pour 10 kWh, dit l’ingénieur Donner. Celui-ci précise qu’il n’y a pas garantie de prix pour les utilisateurs. Mais jusqu’à présent, la coopérative reste en dessous du prix du chauffage au mazout. Il suppose que la baisse actuelle du mazout devrait un jour cesser. En été, seul le biogaz intervient. Toutefois, il arrive que la chaudière à plaquettes soit mise en route pour sécher des bois de valeur. Il est à signaler également qu’une quinzaine de personnes, représentant divers métiers, effectue du bénévolat. Il est rare qu’on fasse appel à de la main-d’œuvre extérieure. Pour la facture, les villageois paient un acompte mensuel, et il y a une révision annuelle en juin. Les responsables ont ainsi l’occasion de rencontrer les utilisateurs.
Le jour de notre visite, la température de l’eau chaude était à 77°C, le retour à 51°C. S’il y a un problème, dit M. Donner, on augmente le régime des pompes, ce qui augmente les débits.
Joseph François